Un appartement dans le ciel

Il a fallu qu’il monte sur le toit de sa maison pour comprendre où se concrétiserait son vieux rêve d’architecture. Depuis, Philippe a fait dresser là un appartement qui embrasse les arbres et le ciel.

Un toit pour page blanche

Depuis toujours, il avait caressé le rêve de concevoir lui-même un lieu de vie qui lui ressemblerait et où il pourrait tout imaginer dans les moindres détails. Les aléas de l’existence font que ces envies-là prennent parfois du temps… Pour Philippe Sladden, l’épiphanie est venue le jour où il est monté sur la toiture (plate) de son immeuble pour réaliser un menu entretien. “Là, je me suis rendu compte qu’en prenant de la hauteur, on avait une vue intéressante sur l’intérieur de l’îlot et que, côté rue, on se retrouvait au niveau des arbres. Je me suis dit: inutile d’aller chercher ailleurs. Voilà un environnement magnifique, une page blanche idéale!”

Comme au cinéma

Considérablement plus bas que ses voisins, l’immeuble ne comptait que deux niveaux. Bâtir sur le toit semblait envisageable. Philippe s’est alors adressé à une jeune architecte, Michèle Verhelst. “Mon client avait une idée précise de ce qu’il voulait. J’ai été en quelque sorte l’accompagnatrice du projet”, explique-t-elle humblement. “Son idée était celle d’un loft suspendu dans les arbres, doté d’une vue traversante.” Ajouter un étage à une maison n’est-il pas périlleux? “Même si elles n’ont pas toujours des fondations, les maisons bruxelloises sont en général dotées de murs porteurs assez solides. Poser une ossature bois, qui est assez légère, peut se faire sans problème. Qui plus est, les ossatures bois ont quelque chose de magique, elles se montent très vite: un peu comme un décor de cinéma!”

Voir pour mieux imaginer

L’architecte a d’ailleurs insufflé quelques idées pour le moins scénographiques, comme cette très belle terrasse couverte côté rue (“cela permet de faire un barbecue, même quand il pleut”, précise-t-elle) ou encore ces plafonds s’élevant vers le ciel en direction du jardin: une manière de happer une lumière maximale. Enfin, saluons le parement en panneaux rouges: une intervention osée et néanmoins harmonieuse avec le bâti voisin. Pour ce qui est des finitions, de la disposition des pièces ou la déco, c’est la patte de Philippe qu’il faut saluer. “J’avais demandé à Michèle Verhelst de réaliser une boîte vide”, explique-t-il, “car je trouvais difficile de me rendre compte des volumes et des proportions sur base de plans.” Ce n’est donc qu’une fois la structure réalisée CASCO, que Philippe a commencé à imaginer son intérieur: étape par étape.

Aux premières loges, du matin au soir

L’architecte avait préparé le terrain pour que Philippe puisse choisir jusqu’à l’emplacement de la cuisine, qu’il décida de cacher derrière une porte coulissante. “J’adore cuisiner mais je préfère le faire sans qu’on regarde par-dessus mon épaule. Ici, je peux travailler à mon aise. Quand le repas est prêt, je referme la porte et le désordre n’encombre pas mes invités.” Philippe rêvait aussi d’une grande bibliothèque où il exposerait des objets qu’il aime. Il l’a dessinée lui-même, veillant à une asymétrie des volumes pour conférer du dynamisme à l’ensemble. Pour le mobilier, il a mêlé quelques pièces des années trente avec des choses plus légères et plus actuelles telles que cette table à manger ultrafine entourée de chaises de jardin, prêtes à être sorties aux beaux jours. Les couleurs ont la part belle. Au départ, Philippe a pensé à une palette de couleurs pleines inspirées de Mondrian. Finalement, il a opté pour une version plus atténuée avec des tons adoucis aux accents zen. Comme un clin d’œil, un portrait géant de sa petite fille “en bouddha” trône dans le coin salle à manger. Maintenant que son rêve d’architecture est réalisé, de quoi notre hôte est-il le plus content? “On se plaint beaucoup de la météo, mais j’ai souvent le soleil qui vient me dire bonjour au petit-déjeuner. Le côté le plus agréable, surtout en été, est de vivre dans les arbres. Au couchant, je profite du ballet des perruches vertes qui passent ici chaque soir.”

Source: Gael Maison édition avril/mai 2015 | Texte Jean-Michel Leclercq | Photos Laurent Brandajs