Intérieur: Douceur de titan

”On a quand même pas mal éventré la maison”, confesse Virginie Jacobs. Si cette maison bruxelloise typique allie aujourd’hui cachet historique et charme contemporain, c’est au prix d’un travail de titan. Un travail que l’architecte de Une brique dans le ventre a réalisé avec calme et minutie.

“Ces portes vitrées-ci étaient auparavant de l’autre côté de la pièce. J’ai imaginé une astuce pour les adapter. Celles qui menaient au jardin, nous les avons remontées vers notre chambre. Pas mal de choses ont ainsi bougé. Il était vraiment important pour nous de conserver tout ce qui pouvait l’être : les mosaïques, les vitraux, les parquets ou les portes… En même temps, tout devait être refait ! Pendant le chantier, j’avais rangé toutes les charnières et poignées dans des boîtes référencées avec précision.” Un œil distrait pourrait ne pas voir l’ampleur de la rénovation opérée ici, tant les nombreux éléments historiques semblent avoir toujours été là. On pourrait croire qu’il a suffi de poser une simple annexe à l’arrière pour qu’elle arbore son visage actuel. Il n’en est rien. “On a quand même pas mal éventré la maison”, précise notre hôte. 

Maison vivante

Voilà cinq ans que Virginie Jacobs vit ici avec son compagnon et leurs deux enfants. Les fans du petit écran connaissent bien cette architecte, passionnée de design, coanimatrice de Une brique dans le ventre. Mais comment l’imaginent-ils vivre au quotidien ? “Je tiens à dire que nous avons particulièrement bien rangé la maison pour les photos. Au quotidien, nous sommes incapables de vivre comme dans les magazines”, s’amuse-t-elle. “Nous essayons de temps en temps, mais cela ne dure jamais longtemps. Notre maison est une maison qui vit !” Même “en désordre” (désordre très relatif), la maison de Virginie Jacobs témoigne d’un amour des beaux meubles, vintage ou contemporains, et d’un sens de l’architecture tourné vers le confort de vivre. Son compagnon et elle ont initialement craqué pour cette maison pour son jardin de plain-pied – un vrai bout de nature en ville – et pour ses nombreux détails d’origine. Les précédents propriétaires l’avaient toutefois saucissonnée en trois appartements et tout l’arrière se présentait comme un amas d’annexes chaotique. Celles-ci ont disparu pour faire place à une nouvelle extension accueillant au rez une grande cuisine à vivre en contact direct avec le jardin et, à l’étage, un bureau dominé par une bibliothèque monumentale où les revues spécialisées côtoient les Gaston Lagaffe. “C’est cela la vie de famille !”, glisse-t-elle.

Chantier tranquille

Entre le corps de logis principal et l’extension, un grand vide invite la lumière, tout en dispersant la chaleur de son poêle à bois aux deux premiers niveaux de la maison. Dessinée par l’architecte, la cuisine a été réalisée par son ami designer Frédéric Richard. De manière générale, Virginie Jacobs travaille avec des corps de métier qu’elle connaît bien. “Ce chantier était très complexe, mais tout s’est passé tranquillement, presque sans accroche.” Elle nous fait l’éloge du ferronnier qui a réalisé les volées d’escalier ou du restaurateur de vitraux qui a découpé les anciens vitraux pour les fixer sur les nouveaux châssis à double vitrage. Il y eut aussi des interventions importantes d’un point de vue structurel : l’ouverture de la salle à manger vers la cage d’escalier et, surtout, l’aménagement des caves, avec buanderie, toilettes, sauna, puits de lumière et de nombreux rangements. “Cela a été un vrai investissement, mais cela en valait la peine car cela a permis de créer de vrais espaces de vie aux niveaux supérieurs.”

Mariage d’époques

Au rez, nouveaux planchers et dalles de béton soulignent la délicatesse des sols en mosaïque d’origine. Peintes en blancs, les moulures murales mettent en valeur les cheminées de marbre, tout en évitant qu’elles alourdissent l’atmosphère. Le mobilier éclectique et les luminaires participent d’un même sentiment de légèreté. Avec son îlot de cuisine et ses deux tables à manger, le séjour permet une vie familiale décontractée où il y a toujours de la place pour chaque activité. A l’écart, côté rue, le salon autorise des moments partagés autour d’un film. Le premier étage accueille le bureau de Virginie et la suite parentale. Le vide entre les deux, permet de séparer clairement vies privée et professionnelle. Avec sa baignoire à côté du lit, la chambre à coucher surprend un peu. “Ce n’était pas le but au départ. Cette pièce devait être un dressing. Mais on a fini par intervertir les deux.” Dressing, chambre et salle de bains font la part belle au mobilier sur mesure aux lignes contemporaines, dont les tonalités sont inspirées par les verres teintés des portes vitrées. Une belle manière de marier les époques.

Modularité à venir

Au deuxième, les chambres des enfants, avec leur salle de bains. Le troisième a été rénové, mais pas encore aménagé. “A terme, nous pourrions y faire deux autres chambres, et une salle de bains. Nous pourrions aussi créer deux appartements distincts aux deuxième et troisième pour quand les enfants seront plus grands… On n’en est pas encore là !” C’est vrai que les enfants sont encore jeunes et qu’il s’agit davantage, pour l’instant, de ranger leurs jeux ou de profiter du vide surplombant le séjour pour leur jeter de temps à autre les vêtements qu’ils réclament. Bref, oui, une maison vivante !

Paru dans Gael Maison 8/2019. Photos et stylisme Caroline Dethier Texte Jean-Michel Leclercq

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