Loft à Liège
Construisant eux-mêmes des pièces de mobilier, imaginant des astuces originales et des solutions très pratiques, Dimitri Brisy et Margaux Fanon,
tous deux architectes, ont offert à leur loft une atmosphère très personnelle. A la fois ludique, poétique et industrielle, celle-ci sent bon la jeunesse.
C’est sans doute le grand avantage des lofts et bâtiments industriels: les âmes créatives, architectes ou pas, peuvent librement y repenser les typologies de l’habitat. C’est ce qu’on fait Dimitri Brisy et sa compagne, Margaux Fanon, en rachetant en gros œuvre fermé cet espace sur deux plateaux. “Ce n’est pas du tout ce que nous cherchions, mais en voyant un tel espace, nous avons eu le coup de foudre”, explique Dimitri. L’histoire du lieu? Il hébergeait à l’origine l’imprimerie de la Gazette de Liège, avant d’être utilisé par la fabrique d’armes de la FN… puis d’être repris par un négociant en vins. Si pour les humains le doute est permis, les bâtiments, eux, ont plusieurs vies.
Dans la lumière de la grotte
Cette dernière vie vinophile inspira au jeune couple d’architectes un très original salon cave à vins et cave à bières mettant en scène les alcôves en briques de l’ancienne cave. “Il aurait été dommage de ne garder aucune trace de l’histoire du bâtiment. Ceci nous semblait une bonne manière de le faire.” Toujours au sous-sol, plutôt que de lutter contre la pénombre, Dimitri et Margaux ont décidé d’en jouer pour aménager une chambre aux airs de suite d’hôtel. En version décontractée. Ici, donc, le noir domine: au plafond, au sol et sur la plupart des murs. Le recours à des spots directionnels, toutefois, magnifie le blanc des draps et des tentures. L’atmosphère est douce et feutrée. Dimitri, qui nous fait visiter, dévoile alors la salle de bains derrière un panneau amovible: “Nous voulions éviter toute sensation d’enfermement. Et puis, c’est chouette de discuter depuis la baignoire, non?”
Pièce rapportée
En haut, tout autre ambiance. Le couple ne voulait pas briser la continuité de ce vaste espace de 18 mètres sur 7. En revanche, il leur fallait distinguer espace de vie et espace professionnel. La solution est venue en posant au centre un grand volume en OSB poncé. “C’est véritablement un élément rapporté. La plupart du temps, les portes coulissantes sont ouvertes, car nous aimons préserver le contact avec la rue.” Ce grand volume central abrite une abondance de rangements (avec même des tiroirs sous les marches de l’escalier!), mais aussi ‘la cabane’: une minichambre d’amis haute de 1m50. Chiche mais suffisante! “C’est vrai que tout le monde n’aime pas, mais ceux qui aiment, aiment vraiment”, confie Dimitri. A terme, l’espace pourrait se muer en salle de jeux… dès lors que l’actuel bureau a été pensé pour se transformer, lui, en futures chambres d’enfants, adjointes d’une salle de douche. Se projeter dans les besoins à venir… c’est cela aussi l’architecture.
Idées à la pelle
Riches en idées, Dimitri et Margaux se sont aussi amusés au plan décoratif. Dès l’entrée, une étoile signalétique lumineuse indique la direction de chaque pièce. Originaux aussi, les interrupteurs composés à partir de boîtiers de sonnettes métalliques. Un même esprit industriel a inspiré une suspension sculpturale réalisée à partir de tonneaux métalliques. Cet aspect industriel se fait classieux côté salon grâce à un long meuble profilé en acier avec platine vinyle intégrée. Fidèle au désir d’ouverture du couple, la cuisine se résume à un vaste îlot, où même le frigo se cache dans des tiroirs. La salle à manger s’articule autour d’une table en bois sculpturale réalisée par l’ébéniste et designer Gianni Arlia… un ami et un voisin. Un sympathique baby-foot a, quant à lui, atterri là simplement parce qu’il y avait la place.
Désirs de ville
L’intervention la plus hors du commun est peut-être l’installation murale signée Dimitri: “Nous habitions un appartement avec une belle vue urbaine et avions peur que cela nous manque ici. Alors, j’ai créé une ville symbolique où l’on voit des tours comme sortir des nuages. Il y a plusieurs petites scènes que l’on peut observer avec des jumelles.” Entre-temps, l’ancien appartement avec vue ne leur manque pas finalement. La cour et le jardin orientés sud, avec leur microclimat et leur brasero, constituent une consolation plus qu’enviable.
Source: Gael Maison mai 2016 | Photographie Laurent Brandajs | Stylisme Nathalie Horion | Texte Jean-Michel Leclercq