Une maison en béton, bois et or

Repartir de zéro plutôt que rénover à grands frais, c’est ce qu’ont fait les Made Architects en construisant pour eux cette maison lumineuse et chaleureuse, dotée du petit supplément d’âme qui manque parfois aux constructions neuves.

Il y a quelques années, Gill et Liesbeth, en couple à la ville comme au bureau au sein de MADE Architects, ont acquis une maison de rangée dans un quartier du nord d’Anvers. “Ce qui nous a attirés, raconte Liesbeth, c’était son orientation idéale – sud-ouest pour la façade arrière – et le fait qu’elle avait un jardin.” L’étroit bâtiment du début du XXe siècle était toutefois assez banal. Et, comme c’est souvent le cas, il s’était vu ajouter, au fil des ans et des occupants, différentes annexes. A l’intérieur, les étages étaient sombres. Constatant que rénover et tenter de retrouver la structure originelle serait aussi cher et laborieux que tout démolir et reconstruire, Gill et Liesbeth décidèrent de faire table rase.

Point de vue

Liesbeth s’explique. “Un autre avantage de la reconstruction était la possibilité de concevoir un bâtiment basse énergie, répondant aux normes techniques et d’isolation actuelles.” A l’intérieur, Gill et Liesbeth ont privilégié une finition pragmatique sans chichis décoratifs, tout en robustesse et en textures. “Nous ne voulions pas pour autant vivre dans une boîte blanche. Nous voulions de la chaleur et de la convivialité.” Cette envie s’observe d’ailleurs à travers tous leurs projets. “Nous n’aimons pas les lieux trop épurés, ceux que nous concevons gardent tous un côté un peu brut de décoffrage, pas trop léché. Mêler les matériaux est une manière toujours assez efficace d’atteindre ce côté chaleureux.”

En cascade

La structure de la maison est peu commune. Pour la comprendre, le visiteur doit traverser l’espace polyvalent situé côté rue pour arriver en cuisine. Là, il découvrira qu’un patio sépare le volume à rue s’élevant sur 4 niveaux d’un second volume, de plain-pied, où est aménagé le séjour. Ensuite, vient le jardin verdoyant. Le patio est comme un petit jardin zen à ciel ouvert. Il officie comme un puits de lumière, alimentant les quatre niveaux de la première maison. Il crée aussi de belles perspectives. Depuis la cuisine, le regard passe successivement à l’extérieur (patio), puis à l’intérieur (séjour), pour sortir à nouveau vers le jardin. Ces vues en cascade confèrent du caractère et de la profondeur à la maison. Les différences de niveaux jouent un rôle similaire. Le jardin se trouve en contrebas par rapport à la rue. La cuisine, plus haute, a été aménagée au-dessus de l’ancienne cave que l’on n’a pas démolie. Cette déclivité fait que le séjour se trouve en rez-de-jardin. Détail intéressant: comme les plafonds ont été traités dans le même plan, la cuisine est un peu moins haute que le séjour, qui paraît d’autant plus spacieux.

Bois et béton

Au rez, Gill et Liesbeth ont opté pour des sols en béton, un revêtement idéal quand on a des enfants qui vont et viennent entre rue, patio, jardin et intérieur. Les pièces du bas sont toutes dotées de portes fenêtres en accordéon permettant de libres allées et venues. Les plafonds en bois sont en fait le gîtage du plancher de l’étage, laissé apparent. Dans cette maison large de 4,5 m, relier les deux mitoyens par des poutres d’un seul tenant ne posait aucun souci. Du coup, tous les sols des étages sont en bois. Bois et béton accueillent ainsi un joyeux méli-mélo de meubles. “Quand nous avons emménagé, raconte Liesbeth, nous avions peu de mobilier : on venait d’un tout petit appartement et puis, on n’avait plus de budget pour cela.” Dans le ‘séjour-jardin d’hiver’, c’est une longue bibliothèque Kewlox, personnalisée par des portes de couleurs, qui attire d’abord l’attention. Puis on apprécie quelques belles pièces de famille – ‘Elda Chair’ de Joe Colombo – ou des créations propres – table à manger faite d’un panneau de coffrage posé sur des tréteaux. Pour l’aménagement de la cuisine, Gill et Liesbeth ont collaboré avec l’architecte d’intérieur Dries Otten. Ici, on remarque d’abord le placard mural sur toute hauteur qui sépare l’entrée du reste de la maison, protégeant ainsi l’habitation de l’agitation de la rue. Et qui participe à cette agréable sensation que dégagent les lieux, où l’on n’a jamais l’impression d’être dans une construction neuve. Que du contraire !

Texte Karin De Ridder | Stylisme Griet Snoeks | Photos Tim Van De Velde