Sur fond blanc
Quand il conseille des gens dans sa boutique, Jeroen les invite toujours à se laisser tenter par des objets colorés. En aménageant cette très vieille maison, il n’a pas hésité. Simplement, il l’a fait sur une toile blanche.
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“Cette maison a tout d’abord été une étable… construite il y a près de 500 ans ! Elle avait été entre-temps transformée en logement. Les voisins m’ont appris que j’en étais le huitième occupant en trente ans. Aucun de mes prédécesseurs ne l’avait proprement rénovée et, même si elle n’était pas dans un état désastreux, j’ai voulu tout reprendre à zéro”, explique Jeroen. Styliste et conseiller dans une boutique de déco, le jeune créateur s’en est donné à cœur joie pour faire de cette petite bâtisse située en plein cœur historique de Deventer (Pays-Bas) un espace de vie contemporain qui lui ressemble.

Approche intuitive
“Je n’avais pas d’image précise du résultat final au départ, mais je voyais ce vers quoi je voulais aller. Quand j’ai reçu les clés, j’ai tout d’abord organisé une fête de nouvel an. Puis, le lendemain, on s’est retrouvé avec quelques amis pour commencer à tout mettre à nu. La salle de bains, qui était au premier, a été l’une des première choses à disparaître. Non seulement, elle fuyait de partout mais je voulais surtout en installer une nouvelle au deuxième. Celui-ci était alors divisé en un couloir et deux petites chambres. De là, une échelle permettait d’accéder au grenier. Nous avons supprimé toutes les anciennes cloisons.J’avais envie d’organiser l’espace ainsi : cuisine et salle à manger en bas, salon au premier, et enfin chambre et salle de bains au deuxième étage.” Sur Instagram, les photos de son chantier n’ont pas tardé à faire un petit carton. Il faut dire que Jeroen n’a pas traîné. En deux mois à peine, tout était fini : la nouvelle cuisine et la nouvelle salle de bains, des sols coulés au rez et au premier, des boiseries et murs restaurés. Le tout, peint en blanc. “Oui, c’est allé très vite. Beaucoup de choses ont été pensées et improvisées en cours de route. J’estime qu’il ne faut pas trop réfléchir à ce que l’on va faire. Le résultat en devient trop appliqué.”

Imprévisibilité
L’invitation des couleurs s’est faite avec une même décontraction.
“Les chaises Eames jaunes sont un cadeau de mon employeur. Elles ont été
mon point de départ, mais rester calé sur jaune aurait donné
un résultat trop prévisible. A la boutique où je travaille, il m’arrive
d’entendre des clients s’exclamer : “Oh, quelle belle chaise orange.
Hélas, je n’ai rien d’orange chez moi.” Ce à quoi je leur réponds que
cette chaise permettrait justement d’y remédier..” La base du décor n’en
est pas moins un blanc immaculé.

“Cela met toutes les autres couleurs en valeur, comme par exemple le vert olive des escaliers. Ma règle est : peu importe les couleurs… du moment que je les trouve belles ! Je remarque que la plupart des gens aiment toutes sortes de couleurs différentes, mais n’osent tout simplement pas les associer. C’est dommage. Associer les couleurs, les motifs et les matériaux que vous aimez est précisément ce qui rendra votre intérieur unique. Ce qui lui donnera sa dynamique.”

Le goût de la contradiction
Les classiques du design sont combinés à des pièces plus contemporaines. La table à manger est une authentique “découverte de grange”, telles que les décrivent les amateurs d’ancêtres automobiles (Barn find, dit-on dans leur jargon). “C’est effectivement dans la grange d’un client, sous une montagne de poussière, que j’ai découvert cette table originale de Martin Visser datant de 1960. J’en ai remplacé le plateau par un nouveau en formica. Je dois dire que je n’aime pas trop les tables en bois. Je trouve ça trop cosy.”En contraste avec sa collection de meubles et accessoires colorés, ses luminaires sont pour ainsi dire tous noirs. “J’ai du mal à expliquer pourquoi, mais j’adore tout simplement les lampes noires. Peut-être parce qu’on ne peut pas imaginer plus grand contraste avec la lumière qu’elles dégagent.” Son ancien canapé gris n’a lui pas survécu longtemps dans ce nouveau décor. “Il me semblait tout à coup ennuyeux. Il ne m’inspirait plus rien. J’aime jouer sur les oppositions, voire les contradictions. Ce canapé bleu de Hay affirme sa présence. Il crée la tension dont la pièce avait besoin.” Face à un tel résultat – transformer une minimaison sombre et vieillotte en un logement contemporain, frais et spacieux –, Jeroen ne cache pas sa satisfaction. Il ajoute : “Je serais prêt à relever le défi une fois encore.”
Texte: Erik Paul Jager. Photos: Jansje Klazinga. Production: Rob Jansen.
Source: Gael Maison 1/2021